Peinture de Carl Vilhelm Holsoe
L’Ami,
L’on nous a fait croire, comme une évidence que la Vie s’arrêtait à notre existence.
Le fait d’être, n’a plus réellement interpellé les gens.
D’aucuns ont échafaudé des stratégies de vie, pour se donner du sens, mais n’ont jamais réellement voulu admettre La Sagesse qui suit son cours, depuis des milliards d’années, inéluctablement.
J’ai lu de nombreux ouvrages, des pavés de philosophie, de sociologie, de psychologie et je me suis souvent dit : tant de pages noircies, tant de paroles prononcées, et sans doute, une larme de vérité, une larme a glissé sur ces feuillets.
Des balbutiements, des contorsions, des tentatives de dire Quelque Chose.
Je suivais du bout des doigts les lignes, avec une fougue non contenue, une curiosité insatiable.
J’ai pris le soin de parcourir les livres, fouillant, comme une archéologue, avec ténacité, cherchant quelque part, une vérité, une lumière.
Je suis restée longtemps comme suspendue aux feuillets, comprenant avec une singularité qui me surprenait toujours, que tout semblait provenir d’une Réalité probable, précise et que certains semblaient juste effleurer.
Je n’écartais rien, et pourtant, une sorte de sélection naturelle opérait.
J’en étais sans cesse alertée.
Pourquoi ces livres me semblaient contourner La Réalité ?
Pourquoi cela me semblait-il si stérile ?
Je serais allée jusqu’au bout du monde, pour une goutte de Sagesse.
Mais, où aller ?
Les événements de la vie elle-même, sont à nous donner ces interrogés, puisque la vie continue, lors même que nous sommes en cette crucialité de La Quête.
Nous aimerions demeurer sous un arbre, et pourtant, il nous faut bouger.
Ici, et là.
La première meurtrissure en mon être provient de ce que l’on nous impose, en une frénésie innommable, une incessante mobilité.
Nous sommes littéralement pris en otage.
L’Ami, je n’ai pas fui les responsabilités, loin de là !
J’ai mis un pied après l’autre.
J’ai souvent trébuché.
Néanmoins, une force qui me dépasse, une Vie, une Voix, un Appel me tiraient constamment.
J’ai souvent éprouvé une incroyable nostalgie qui se soldait par un « arrêt » immédiat.
La Question s’imposait : que se passe-t-il donc ?
La Vie est, de tout Son Sens, Elle, Puissante, lisible, décelable, proche à ne plus vous lâcher.
La Vie est à Elle-seule toute La Voie !
La Vie !
Je t’ai dit : Nous sommes dedans, ne vois-tu pas ?
La Vie palpable et impalpable tout à la fois !
La Vie que mes mains savent toucher de Son Invisibilité !
La Vie vibrante, extatique, vivante de vie.
La Vie qui me transperce et qui est mon être.
La Vie qui est L’Âme !
Je suis en Lui !
En Son Âme !
Que font donc les livres, si ce n’est balbutier l’évidence ?
Depuis un Centre, La Vie est Noyau et encore Noyau et encore Noyau…
Le Point !
L’infime et Le Grand.
L’Intérieur et L’Extérieur !
Nous sommes dedans !
Et « Je » Se touche !
Comprends-bien !
Là !
Encore Là !
Ici !
Hier, aujourd’hui et demain se côtoient, se frôlent, s’épousent.
Tout est intact.
La Vie se succède à La Vie, et, ici est Son Évidence de toute Son Éternité.
Je ne veux plus m’égarer sur les sentiers de ceux qui balbutient des sons sans entendre, et qui disent sans jamais voir !
J’ai réalisé que nous dépensons la plus grande énergie de notre Vie à ne pas vouloir précisément voir !
Nous jetons voile sur voile.
Nous épuisons une Vie entière pour être délibérément aveugle !
Nous nous détruisons pour finir en cette éhontée cécité !
Toute l’énergie qui devait servir, de fait, à découvrir, à dévoiler ce que nous sommes, nous la dilapidons à ne pas vouloir le faire !
Nous nous détournons de l’évidence et allons activement vers l’obscurité !
Stupide et piètre attitude !
Nous mettons en place la plus grande et la plus ingénieuse des stratégies pour nous leurrer.
A quoi bon ?
Tôt ou tard, La Réalité nous rattrapera…