L’observateur et l’Interlocuteur

Je voyais les gens inertes malgré leur apparente mobilité, mais je pensais que tout le monde était heureux. Je n’en doutais pas une seule seconde. Pourtant, je ne cherchais pas le Bonheur. Je ne savais pas ce que les gens cherchaient, mais, dans le fond, je ne cherchais rien. Être en vie est une unité à part entière. J’aimais. Cela passait par toutes les cellules du corps, de l’esprit, de l’âme. Cela était. Prédisposition naturelle à être. La vie est simplement une Réalité d’Amour. Une chaleur expansive. Tandis que nous avancions dans la petite enfance, nous fûmes confrontée à la dissonance. Nous découvrîmes que la douleur, la tristesse, l’erreur, les colères, la peur, la maladie existaient. Distorsion qui pouvait supplanter étrangement la réalité. Submersion insidieuse, invisibilité rendue visible par les éléments de la vie. Mais, qu’était donc la vie ? Le cauchemar faisait son apparition, étendait sa toile sur le palpable et l’impalpable.

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Du moi au Soi

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Étonnamment, l’être qui reçoit en lui la toute Compassion est un être qui a fait le chemin en lui, en Lui… Il a appris à s’effacer chaque jour, à abandonner sa réalité, celle qui le réduit à vivre sur un plan exclusivement égoïste. Il vit seconde après seconde l’anéantissement du moi. Mais pour cela, il apprend le « moi ». Il le connaît. Il apprend à le voir, à le reconnaître. Il apprend à voir ses ruses multiples, les divers plans qu’il met en place en s’immergeant totalement dans les arcanes les plus reculés de son être pour échapper au Soi. Le Maître dit : la plus belle des expériences possibles est de vivre la ruine complète et de voir ainsi chacun des éléments de la ruine, de l’édifice écroulé.

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Transcendance

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Si on te demandait : comment as-tu connu Dieu, que répondrais-tu ?

– Je répondrais : par Lui-même.

Mais si j’insistais encore, que me dirais-tu ?

– Je l’ai connu par Son action en moi-même.

– Néanmoins, comment puis-je comprendre une telle réponse ? Comment puis-je accéder à son secret ?

– Le secret est Lui et Il te donne à le voir. Telle est la Réalité de la Vision. Il t’ouvre simultanément à la Connaissance de Lui, comme Il t’ouvre aussi à la non-connaissance de Lui.

– Mais, comment peut-on ne pas Le connaître ?

– Il est Celui qui te révèle le Secret de cette connaissance. Mais peu accèdent à l’Être, comme peu accèdent au Non-Être. Le Non-Être fait partie de l’unité de la Connaissance, car le Non-Être amène à l’Être. Si tu connais le Non-Être, tu connais inévitablement l’Être.

– Qu’est-ce donc que la Transcendance ? Qu’est-ce donc que la Réalité de la Connaissance ? Quand entrons-nous dans la Transcendance ?

– La Transcendance est de nature à te révéler ce qui est caché en toi. Elle est la Jointure des liens, de toutes les correspondances avec ce qui est, ici et au-delà. Une éclosion.

– Le lieu du Tout Commencement ?

– Le lieu de L’Être. La Résorption du Non-Être dans l’Être.

Croix brisée

D’un revers de main, ni horizon, ni verticalité. Un point, le grain d’Amour. Le Tout entier, flottant sur l’arche d’un Océan illimité. Ni potence, ni crucifixion, mais seule la Loi de l’Unicité. Libération et élévation de l’Âme par l’effervescence d’un Cheval céleste, la monture depuis un Rocher. Stabilisation en l’Immutabilité et comment en serait-il autrement ? Je me suis agenouillée devant la seule Réalité. Ni fils, ni Père, mais L’Un. Par où puis-je me libérer si ce n’est en cette ruine des ruines ? Il n’est ni croix, ni potence comme symbole de l’Êtreté, mais bien L’Unicité. Je ne crois pas en ce trois, mais demeure en L’Un. Ni espace, ni figement dans la Mâyâ. Ceci n’est qu’une projection et L’Un est ma Cible, tandis qu’Il fait de moi Sa Volonté. Comment traverserais-je le Pont de la Traversée ? La douleur a certes ses effets, mais vois plutôt la Délivrance. Au Centre est la germination. Ni à droite, ni à gauche. La flèche atteint ce point au sein des cercles concentriques. Vague après vague, c’est au centre que je suis. Dieu est le plus Grand des iconoclastes. Il détruit les temples d’un revers de Main. Il détruit les ruines, car ce ne sont plus que des pierres dans le cœur des gens. Figement. Tu n’as vu de ces sédiments que leur solidité, tandis que mon âme pénètre le secret d’une salive conglomérant les sédiments les uns avec les autres.

Mon Maître dit : Habba, Hub, Baqâa. Graine, Amour et stabilité.

Les hommes ont peur de ne pas être aimés

La plupart des gens ont peur de Dieu. Une peur viscérale qui les pousse jusqu’à Le rejeter, comme s’ils pouvaient échapper au Souverain Maître. C’est comme si l’on disait : je veux échapper au fait même d’être. Le rejeter, parce que la vision que l’on a de Dieu est une vision personnelle, la vision que l’on aimerait avoir de Dieu. Sans doute de nous-mêmes ! Il y a une forme manifeste d’immaturité dans cette idée de Dieu. Il s’agit d’une idée que l’on se fait de la vie. Elle nous est due. Dieu nous serait dû, aussi. Si Dieu existait, le mal n’existerait pas. Car Dieu est Bon. Oui. C’est vrai. Dieu est Bon. Mais si le mal existe, et si l’on rejette Dieu, que signifie ce mal qui court depuis des millénaires, pourquoi le verrait-on comme le mal et que peut bien être la foi en une Lumière absolutoire ? De fait, ici, l’homme révèle uniquement sa déficience à connaître ce monde, sa dynamique, sa propre réalité en tant qu’homme. L’homme aimerait ni souffrir, ni peiner, ni être en mal d’amour. L’homme aimerait jouir de la vie. Jouissance, festivité. Quelle sorte de projection figée de la vie ! Dieu ne peut pas exister, sinon Il nous donnerait tout et ferait disparaître le mal. Telles sont les drôles d’élucubrations de l’homme gâté, de l’homme festif et égoïste. Pourtant, dans ce souhait vif et ardent est présente la mémoire encore vive d’un Eden perdu. Tout n’est pas complétement faux ! Beaucoup de déviance, mais un reste de réelle mémoire… Alors, quand l’homme ne comprend plus rien, il rejette tout. Il nie tout. Cette peur de Dieu est étonnante. Une peur qui peut parfois se transmuter en haine. Ne pas croire en Dieu, ne veut absolument rien dire. Il faudrait que les hommes puissent s’exprimer en toute sincérité. Mais, même cela, ils ne peuvent y parvenir. La peur les empêche de dire : nous ne savons rien. Nous reconnaissons notre ignorance. Nous reconnaissons nos peurs. Or, la peur de Dieu, la peur de Le voir tel qu’Il est, à travers Sa Création, à travers les événements, à travers les Signes, par la mission de Ses Messagers, par Sa Lumière, par la complexité de cette vie, la multitude et la singularité, tout cela fait peur à certains. Pourtant, tout est là ! Tout nous parle. Tout nous dit qu’il y a Quelque Chose. Tout nous heurte et tout nous émerveille. Tout est Sagesse. Les hommes ont peur de ne pas être aimés de Dieu. Ils se trompent. Ils se trompent de lecture, d’interprétation. Ils n’ont plus les codes de leur existenciation. Mais, s’ils avaient connu l’Amour, ils comprendraient. S’ils s’étaient dilatés en cet Amour, ils auraient appris. S’ils s’étaient abandonnés à Sa Lecture, ils auraient vu.