La tentation de la blessure (1)

En Réponse au commentaire de Cielespoir.

Associer le terme Tentation avec celui de L’Innocence est certes pour le moins interpellant, et nous apparaît comme délibérément provocateur.
L’usage est courant de nos jours, et je dirai que la « tentation » est grande de faire ainsi des effets de style. La motivation reste à la charge de l’auteur.
Nous ajouterons même, qu’il importe de rester vigilant quant à cette facilité que nous avons d’observer, coûte que coûte, des phénomènes de société en réduisant ceux-ci purement à de la sociologie, ou à de l’analyse psychologique, coupé dès lors d’une Dimension verticale, qui assurément revisiterait, elle, les fondations de La Vie, redéploierait Les Arcanes essentielles, liées à L’Origine de L’Homme, et à son processus de développement. De même, une approche globale nous éclairerait utilement sur les effets de dégénérescence et nous donnerait l’entièreté d’une observation reliée enfin au Principe de Vie. Nous sommes souvent à mettre en avant les symptômes d’une maladie, plus rarement, nous proposons les remèdes efficaces. Nous faisons la plupart du temps ce que je nomme du rafistolage primaire, parce que nous ne voulons plus aller en profondeur : nous sommes avares du temps qui passe à la hâte et que nous perdons inéluctablement en cette superficialité permanente. Nous voulons mettre le doigt sur des blessures, mais nous ne voulons pas remonter jusqu’à La Cause initiale, voire fondamentale. Nous sommes à l’image même de la médecine actuelle, que l’on nomme allopathique. Nous sommes aussi en cette ère du supermarché cognitif. Nous voulons Tout, tout de suite !
Or, nous savons que les mots ne sont pas sans être chargés de valeur, que les mots sont même vivants de leur sens d’origine, et que nous avons tendance à en faire usage sans comprendre combien à eux seuls, de par leur vibration, ils agissent sur nous et sur notre environnement. Nous avons perdu depuis longtemps cette Réalité fondatrice de notre existenciation. Nous sommes à l’ignorer, volontairement ou involontairement, ce qui est profondément dramatique, et si nous observons aujourd’hui la facilité que nous avons de prendre la parole pour un oui ou pour un non, nous nous apercevons combien le bavardage incessant sur notre planète, au nom de la communication, emblème universellement défini comme strictement positif, est sans aucun doute, la source de nuisance la plus grande qui soit.
Nous sommes loin de réaliser l’impact des mots, aussi bien sur nous, c’est-à-dire sur l’autre, que sur notre environnement.
La vérité est que nous sommes loin de soupçonner, Ô combien, que nous sommes à révéler notre intériorité par un tel comportement. Ce que nous sommes, nous le disons.
Nous répandons exactement au travers des mots ce que nous ne savons plus cacher de notre être.
Abuser des mots est un grand sacrilège !
Se servir d’eux, en est un autre !
Paraître, en ce que nous sommes pas, tout en étant « le succube des mots », expression que j’emploie à la suite d’un songe qui me donnait à voir ce que certains pratiquent, en pervertissant totalement ce don de manier les mots, est aussi une terrifiante mystification.
Pourtant, il faut le savoir : tout est vivant !
Tout est à s’imprimer sur Le Livre de notre Vie.
Tout ce que nous disons, même le plus infime, est d’ores et déjà à s’imprimer, à s’inscrire sur ce que je nomme notre ADN vital.
Nous ne le savons plus, et pourtant c’est la pure réalité.
Nous sommes responsables de tous nos agissements et de toutes nos paroles.
Nous sommes responsables de tout ce que nous imprimons sur les feuillets d’Un Livre où tout est consigné.
Nous sommes notre propre Livre, et nous sommes notre propre Logiciel. Nous avons un programme, et nous possédons un processeur, voire de multiples processeurs ou micro-processeurs.
Nous sommes une Architecture, complètement reliée à L’Architecture Collective, et de ce fait, à L’Architecture de L’Origine.
Voilà pourquoi nous devons comprendre que nous sommes notre propre héritage.
Nous serons à hériter ce que nous avons inscrit de par nos actes et de par nos propos sur notre propre programme que nous dévions, hélas, depuis de nombreuses années, sans en comprendre la réelle Portée.
Pour en revenir à ce terme de Tentation, il est clair, que nul ne peut être véritablement tenter par L’Innocence.
L’Innocence est une Aspiration qui relève du désir induit du Retour vers L’Origine.
Qu’il soit ou non motivé en l’instant par une stratégie de déresponsabilisation est assurément un signe voilé qui tend à révéler notre désir intime, désir insoupçonné qui est de revenir proprement à notre état initial, notre état primordial.
Tout ce que nous déployons pour « échapper » à la « culpabilité » est l’aveu non maturé qui exprime ceci : je sais que j’ai mal fait, mon programme a donc déclenché en moi cette réaction de panique, car il m’est intolérable, en ma nature intrinsèque, de voir cela, aussi je suis à déployer une stratégie afin de camoufler mon acte ou ma pensée. Je suis dans une compulsion compensatoire pour ne pas me regarder tel que je suis.
Ainsi, il nous apparaît clairement, qu’il ne s’agit pas consciemment de vouloir simuler l’Innocence, mais plutôt d’exprimer le profond désarroi dans lequel nous sommes plongés, lors que nous transgressons les bases même de notre Programme d’Origine. Notre être tout entier est envahi comme par des anti-corps, des soldats qui mènent une bataille contre une légion ennemie quasi imaginaire, qui se veut protéger son territoire de camouflage.
Il n’est pas de Tentation de L’Innocence. Il est une tentation de guérison, avortée.
Parce que nous sommes à agir de la sorte, nous voilà comme entraînés, de plus en plus, inéluctablement et implacablement, vers une cumulation magistrale d’erreurs.

Le commentaire de Cielespoir, ainsi que ma propre réaction, m’amènent à cette analyse ou réflexion autour de La Tentation de l’Innocence de Pascal Bruckner.

Je me propose de le faire en plusieurs étapes et procéderai à une étude minutieuse dudit extrait publié sur notre blog. J’ai appelé cet article La Tentation de La Blessure à dessein, et me veux dénoncer la réalité de cette déresponsabilisation devenue courante à notre époque.

5 commentaires sur “La tentation de la blessure (1)

  1. Un grand merci pour cette si belle réflexion!
    Oui, tant et tant d’erreurs en notre ADN! Comme nous devons désapprendre pour cheminer en « ce Retour vers l’Origine »! Mais avec cette intention d’y tendre, certainement la Route est facilitée et pleine en Cet Espoir!

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  2. Une des erreurs de Bruckner est de considérer l’individualisme comme un état normal de l’être humain. Or, l’individualisme est un effet de ce que René Guénon a appelé le règne de la quantité.
    Dans une société globalisée centrée sur « l’industrialisme » et « l’économisme », il n’y a plus de place pour l’homme qualifié, c’est-à-dire pour un homme conscient de l’ordre principiel. Une société dont le seul but est de produire une quantité indéfinie d’objets standardisés destinés à être consommés par une multitude, contient en germe sa propre dissolution et ne peut fonctionner que sur le modèle de la fourmilière.
    L’individualisme réduit l’individu à une unité purement quantitative et interchangeable.
    Mais même l’être humain le plus ignorant ne peut se résoudre à une telle déchéance tout simplement en raison de son humanité et pour amener cet homme à accepter l’inacceptable, il fallait dans un premier temps lui fermer l’accès au ciel : ce fut l’oeuvre des humanistes, des puritains, de Descartes, des encyclopédistes et des philosophes du 19e siècle. Il fallut ensuite lui faire croire que le soi-disant progrès matériel ferait son bonheur et le bercer dans l’illusion qu’en tant qu’individu, il maîtriserait son destin.
    Quand à l’infantilisme qu’on observe chez nos contemporains,
    c’est excellent moyen de les canaliser en leur créant des besoins factices dont le seul intérêt est la nouveauté. Car le règne de la quantité est aussi celui du changement perpétuel, autrement dit de l’agitation pour elle-même.

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